Ibrahim Traoré a fait preuve de modération et créé un récit

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Ibrahim Traoré a fait preuve de modération et créé un récit.

Le président du gouvernement de transition du Burkina Faso a choisi de conserver sa solde de capitaine plutôt que celle du chef de l’Etat. Un indice de sobriété considéré comme sankariste…

Récipiendaire du « flambeau de la révolution » au Mémorial Thomas Sankara le 15 octobre, l’actuel homme fort du pays est volontairement dépeint comme une réincarnation de l’individu qui a rebaptisé la Haute-Volta. Au-delà des discours sankaristes, qui ont été « samplés » par plusieurs autres, que partagent les deux présidents ? Ibrahim Traoré, putschiste comme le héros national, porte le dernier grade militaire de Sankara, capitaine. « IB » a 34 ans, l’âge célébré par « Thom Sank » l’année où il a pris le pouvoir. Une autre coïncidence calendaire est encore plus troublante : Traoré, né en 1988, serait issu d’une procédure entamée à peu près à l’époque de l’assassinat de Thomas Sankara fin 1987…

En plus de la recherche de contacts, il y a un choix de formulation et une tendance à critiquer directement ou indirectement les politiques en place via le Premier ministre. Au-delà de ces paroles et de ce ton, les Burkinabè attendent désormais des actes à la hauteur des idéaux du Che panafricain des années 1980. Traoré vient de cocher une nouvelle case sankariste dans un registre essentiel : son train de vie présidentiel.

Renault 5
Le 16 novembre, lors d’une réunion du Conseil des ministres, le leader de la transition a décidé de se contenter de sa solde militaire afin de « démontrer cette attitude de sacrifice que chaque Burkinabè doit posséder dans l’état actuel » de la nation. Une méthode, en ces temps incertains, pour ne pas abandonner son treillis pour un manteau et une cravate. Un moyen de s’inscrire à la sobriété promue par Sankara. Dans les années 1980, le président du Conseil National de la Révolution (CNR) achète une Renault 5…

L’esprit révolutionnaire étant affaire d’exemple et de volontarisme collectif, le nouveau décret sur la rémunération des présidents d’établissements et des membres de l’exécutif serre également la ceinture des ministres, abrogeant un décret pris en avril par le Mouvement patriotique pour la Récupération et le Redressement (MPSR). Une décision d’augmentation des salaires ministériels est restée logée dans la bouche des badauds…

Compensation des salaires
Pour enfoncer le clou de la sobriété et parer à l’éventualité de contre-coups d’État, les nouveaux ministres se sont résolus à reverser 50% de leur salaire de novembre au Fonds de solidarité nationale, spécifiquement au profit des déplacés internes…

Les passionnés de l’IB sont ravis. Les cyniques rappellent que Traoré a déclaré qu’il n’était pas intéressé par le pouvoir avant que les récentes élections nationales n’assurent sa position. Les sceptiques sont conscients que les somptueuses villas des PDG n’ont jamais été financées par leur salaire officiel. Quant aux dirigeants irrités et aux médias invités à « prendre position », ils s’abstiennent de tout procès à visée populiste pour qu’on ne « mange pas le piment de leurs lèvres ». Parce que l’harmattan tourne vite au Burkina Faso…

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